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« Dachau, mon baptême »

Présentation du livre de Bernard Py

Bernard PY a publié l'ouvrage « Dachau, mon baptême » en 2011, aux éditions « Saint-Paul éditions religieuses » après une première publication en 1995 sous le titre « Dans le malheur de Dachau, j'ai trouvé un bonheur ». Son histoire est celle de millions de déportés... et elle a débuté dans les Vosges, à Moussey !  

Anne-Laurence de Fleurieu vous propose un écho de ce témoignage et de ce pan de l'histoire de la Vallée du Rabodeau, en mémoire à son propre arrière-grand-père, lui aussi déporté aux côtés de l'auteur.
 

À mon arrière-grand-père Georges.

 

Ce livre est l’histoire vraie et édifiante d’un jeune homme déporté à Dachau en 1944.

Bernard Py décide de prendre la plume et de livrer son témoignage dans les années 90, soit 50 ans après sa déportation. Contrairement à son frère Claude, peu enclin à raconter ce qu’il a vécu, Bernard souhaite partager à tous la conversion intense expérimentée à Dachau. Une conversion qui n’aurait pas eu lieu sans la présence providentielle d’un prêtre dominicain, le père Morelli.

Arrestation

En 1944, Bernard est un étudiant en médecine de 19 ans. Il dit lui-même que sa foi est celle reçue de son enfance, mais vécue dans l’habitude. Revenu dans les Vosges pour les années de guerre, il entre dans la Résistance avec ses deux frères et l’accord de son père.
Rappelons que la vallée du Rabodeau est un des centres les plus actifs de la résistance vosgienne. Les plateaux et forêts sont le théâtre de parachutages d’armes, de jeeps et de soldats anglais. Ces actions s’intensifient à partir de 1944 alors que la défaite allemande est quasi certaine.

Le 24 septembre 1944, alors que la débâcle allemande bat son plein et qu’une partie de la France, dont Paris, est déjà libérée, plusieurs villages de la vallée sont cernés par une troupe de SS (Schutzstaffel, de l’allemand « escadron de protection »). Parmi eux, Moussey, où habite Bernard.

Les habitants sont rassemblés sur la place de l’église tandis que les Allemands (des SS) exigent que les résistants se dénoncent, sous peine d’exécuter des otages pris au hasard. Bernard nous apprend au fil de ces premiers chapitres la grande solidarité existante entre les villageois, personne ne dénonçant qui que ce soit.

Interrogatoire

Tous les hommes de 16 à 60 ans sont donc emmenés, sous les yeux de leur famille, au château de Belval pour des interrogatoires musclés auxquels n’échappe pas Bernard, donc l’un des tympans est brisé suite au supplice de la baignoire. Toutefois, et c’est un premier élément d’humanité chez Bernard, il n’en veut pas à ses bourreaux, soulignant bien que durant cette guerre, beaucoup faisaient des choix qu’ils croyaient justes, quel que soit le camp choisi, et dans un contexte extrêmement complexe.
Suite aux interrogatoires, les plus jeunes sont relâchés tandis que les autres, après un arrêt au camp de Schirmeck et de nouveaux interrogatoires, sont déportés à Dachau. Bernard opère alors un premier abandon à Dieu, alors qu’il est frappé à coups de nerfs de bœuf : il Lui demande secours et assistance, conscient de sa faiblesse psychologique face à la souffrance.

Déportation à Dachau

Commence alors pour Bernard une longue traversée du désert. L’arrivée au camp, les douches, la quarantaine d’arrivée, le changement de vêtements : tout est pensé, en début de captivité, pour réduire les prisonniers à des numéros parmi d’autres.
Bernard découvre un monde qu’il ne soupçonnait pas. Il pose un regard encore neuf sur ce camp de concentration et les hommes qui l’habitent : ce prisonnier, pourquoi semble-t-il ne pas voir les nouveaux qui arrivent ? Ce jeune soldat allemand qui les garde, pourquoi semble-t-il totalement indifférent au sort de ceux qui l’entourent ? Bernard arrive-t-il dans un monde où il n’y a aucun lien humain ?

Le block 25 devient le lieu de couchage, le reste des journées se passant dehors, le temps de la quarantaine, non astreints au travail. C’est à ce moment-là que Bernard fait la connaissance du père Morelli. En effet, Dachau est également le camp des prêtres et séminaristes. Le père Morelli est un dominicain envoyé clandestinement en Allemagne pour assister les Français astreints au STO (Service du travail obligatoire). Dénoncé et arrêté en 1943 pour « complot contre la sûreté de l’Etat allemand », il est déporté.

Survivre à Dachau

Nos amis vosgiens sont triés : valides (dont Bernard fait partie avec son frère Claude) et invalides (comme son père et son parrain).

Les hommes sont d’abord forcés à travailler à Munich, sur les rails des trains bombardés par les alliés. Puis dans des champs de pommes de terre. C’est à partir de ce moment que Bernard entre dans une forme de survie. Il apprend à « organiser » : à voler des pommes de terre, rutabagas ou encore poireaux cachés sous son uniforme rayé pour pouvoir manger plus que la maigre pitance quotidienne. Le jeune homme avoue à partir de là se sentir se déshumaniser : le partage est exclu ou se fait payer très cher, on se jette sur la nourriture comme des animaux, on se désintéresse du regard des autres etc…

En plus d’« organiser », il faut également « assurer » : travailler lentement pour économiser ses forces et son énergie, ne pas se faire remarquer, arrêter de travailler dès que les kapos regardent ailleurs. Devenir un fantôme.

Toute vie humaine et spirituelle est anesthésiée. Bernard se sent chuter. Survivre ? À quoi bon ? L’hiver approche, le froid est de plus en plus mordant, et les poux véhiculent une épidémie de typhus. D’autre part, il apprend le décès de son père le 25 janvier 1945, puis celui de son parrain le 7 mars.

Transformation spirituelle

Pourtant, il existe une lumière dans cette ambiance mortifère : la messe célébrée quasiment toutes les nuits entre 3h et 4h du matin ; une hostie consacrée puis fractionnée en morceaux minuscules distribués ensuite à ceux qui souhaitent communier. D’autre part, le dimanche, les prisonniers sont parfois autorisés à entrer dans le block des prêtres et à s’entretenir avec eux. Permission est également donnée de se retrouver pour Noël et de chanter ensemble quelques chants traditionnels.

Et bien sûr, les contacts fréquents avec le père Morelli qui devient en quelque sorte son père spirituel. Le prêtre lui enseigne sans cesse l’amour de Dieu, un regard paternel et non un regard de supériorité. Se savoir aimé est un palliatif au désespoir. Aussi, Dieu nous aide à vivre au jour le jour si on s’abandonne à Lui avec confiance : vivre le moment présent et l’accueillir dans la confiance, en se remettant entre Ses mains, en faisant de son mieux avec Son assistance. Bernard fait finalement l’expérience d’une foi installée par habitude qui demande à être renouvelée. Le père Morelli ne cesse de lui répéter que les épreuves font le vide en lui, que Dieu a toute la place d’agir et d’envoyer Sa grâce, c’est-à-dire de vivre en lui.

Conversion

L’événement ultime qui le poussera tout entier dans les bras de Dieu est le suivant : alors qu’il reçoit un minuscule morceau de la Sainte Hostie enveloppé dans un papier, il La cache dans son manteau en décidant de La consommer discrètement plus tard dans la journée. Alors qu’il travaille dans son champ et se trouve à nouveau en proie au désespoir, il sent une grande chaleur et une grande joie monter en lui. Il comprend alors que c’est le Seigneur, placé contre son cœur, qui lui parle et lui dit explicitement qu’Il est avec lui et qu’Il l’aime. Le Christ donne sa grâce à tout moment à qui veut bien la recevoir et la vivre.

Bernard peut désormais avancer sans crainte dans cet univers concentrationnaire, il n’est pas seul.

Cette certitude ne le quitte plus et adoucit la fin de sa captivité. Bernard survit à présent dans la confiance : il parle d’une maturité nouvelle qui ne s’estompe plus malgré les rechutes occasionnées par la dureté de la vie du camp. Toutefois, cette conversion est bel et bien le résultat d’un cheminement personnel avec l’aide du père Morelli. Il lui est impossible de communiquer sa joie aux autres, ils ne comprendraient pas.

Libération et retour

Le 29 avril 1945, les Américains se présentent à l’entrée du camp. Bernard Py accueille la libération avec joie et déjà dans le pardon. Il n’en veut pas à ses gardiens et déplore les exactions, voire assassinats, dont certains sont victimes.

Après un temps d’hospitalisation, Bernard rentre chez lui avec son frère. Il est transformé. Il a déjà commencé à réfléchir sur sa conversion et son rapport à Dieu durant tout son emprisonnement. Pourquoi cette grâce d’avoir rencontré le père Morelli, d’avoir reçu Jésus hostie et cette révélation presque physique de Son amour quand d’autres sont morts seuls, malades, miséreux, désespérés… ?
Quelle attitude avoir en rentrant de camp ? Vis-à-vis des autres, famille, amis, Français non déportés ?

Bernard se heurte à l’indifférence et la gêne de ses proches. À la suspicion des autorités. À la haine et au désir de vengeance des victimes de la guerre, des membres des associations d’anciens déportés.

Lui se place dans une perspective de paix. Il cherche à comprendre les positions de chacun sans juger aucunement. Il se tourne résolument vers la vie à travers son métier de médecin, son mariage, la naissance des ses enfants et l’association qu’il cofonde : « Grossesse Secours », devenue « SOS Grossesse », pour venir en aide aux femmes enceintes en difficulté.

Bernard a fait de sa souffrance un outil d’amour. Il a laissé son cœur se dilater plutôt que de se racornir. Le Christ l’a visité et transformé : il est demeuré attaché à Lui pour toujours en menant sa vie et ses relations à la lumière de Son Évangile.


Anne-Laurence de Fleurieu 




   Découvrir l'ouvrage
à la librairie Quai des Mots 


 

 

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